L’écriture inclusive pour les malcomprenant·e·s

L’écriture inclusive est à la mode. J’essaie de m’y mettre, avec bien du mal. Il faut dire que je traîne un lourd handicap, séduite que j’étais par les raisonnements de l’Académie française. Elle prétend que genre grammatical et genre naturel sont disjoints, et qu’il existe en français un genre marqué et un genre non marqué ayant valeur extensive1. J’en étais encore là lorsque j’ai publié mon affreux poisson d’avril 2017 imprégné de malveillance et nourri par ces arguments ringards. Maintenant que j’ai pris de bonnes résolutions pour la rentrée, je fais des exercices de rééducation. Mais il y a encore des choses que je n’arrive pas à faire ou que je ne comprends pas.
Voici par exemple deux difficultés.

1° Je ne sais pas expliquer à un petit garçon qui vient d’entrer en CE1 comment on doit prononcer une séquence écrite ainsi :

« les instituteur·rice·s conseillent à leurs nouveau·elle·x·s élèves d’être travailleur·euse·s »

J’espère que c’est correct : je tente d’appliquer les recommandations du manuel qui fournit la formule de composition des mots avec le « point milieu » et où on trouve également des listes de transcriptions2. C’est ainsi que, tentée d’abord d’écrire « nouveaux·elles », j’ai renoncé et observé plus scrupuleusement la règle indiquée page 7 du Manuel, ce qui donne dans mon application de malcomprenante : «  nouveau·elle·x·s ». Inutile de préciser que, d’ordinaire excellente dactylo en écriture « normale » (oops, pardon, en écriture macho), j’ai mis pas mal de temps à taper la séquence. J’excepte bien sûr le temps passé à trouver le code pour obtenir le « point milieu » : on nous rassure, les claviers vont bientôt remédier à ce défaut. N’empêche que même avec cette touche supplémentaire, il va falloir acquérir d’autres automatismes de frappe.

Revenons à notre séquence. Une partie se déchiffre en lecture alphabétique (en voyant ce qui est écrit, on sait quels sons on doit émettre3) mais une autre partie ne peut pas se lire ainsi. En effet, dès qu’un terme contient un ou plusieurs « points milieu », il faut repérer les lettres à déplacer pour les coller à un radical commun qu’il faut isoler mentalement, puis ajouter les éventuelles marques du pluriel qui sont à coller aux mots déjà obtenus, toutes opérations d’autant plus difficiles qu’elles ne se présentent pas séquentiellement. Il n’y a plus de principe homogène de lecture.

Davantage : à certains moments il faut dire ce qu’on voit, à d’autres il faut dire ce qui n’est pas écrit et recourir à une interprétation qui transcende la littéralité. Mais quelle interprétation ? Faut-il dire « les instituteurs et les institutrices » ou mettre en facteur l’article et se lancer dans un shortcharabia du genre « les instituteurs-trices » ou « les instituteurs-institutrices » ? Fort heureusement, je trouve en ligne un charitable article4 qui suggère des solutions pour me sortir de la « crétinerie » :

« Qui s’habitue pendant quelques [sic]5 temps à la lecture de tweets et d’articles en écriture inclusive en arrive tout naturellement à deux types de comportement.
Premièrement, le cerveau transforme cette notation en un terme neutre: si nous lisons «les chanteur·euse·s», nous comprenons immédiatement qu’il s’agit des hommes et des femmes qui chantent. Et hop, passage au mot suivant, comme dans la méthode globale.
Deuxièmement, s’il nous faut désormais lire un texte inclusif à voix haute, on prendra la peine de développer en disant «les chanteurs et les chanteuses», ce qui est moins lourd à l’écrit. »

Sortir de la crétinerie, c’est une gymnastique : « hop » passer au mot suivant « comme dans la méthode globale », autrement dit zapper. Au diable la mécanique, vive la « compréhension » immédiate ! Ou alors à haute voix, c’est « développer » une séquence qui n’est pas écrite et qu’on va chercher où ?…. mais dans sa « culture », dans ses « prérequis » ! Que voilà une bonne idée pour une école « inclusive » qui ne recourt à aucun présupposé, et qui pourfend les « implicites » générateurs de discrimination !

2° Je n’ai toujours pas résolu une question que posait mon insolent poisson d’avril. Comment fait-on dans l’autre sens ? Je veux dire : comment fait-on avec les mots de genre marqué (dit improprement féminin) qui peuvent désigner des personnes de sexe masculin ? J’ai beau scruter les listes du Manuel je ne les y trouve pas6.

Je complique ma vie de malcomprenante en imaginant ce petit exercice pervers : transposer en écriture inclusive et gender-correcte le texte suivant.

« Les nouvelles recrues (de nombreuses personnes ont été admises), se sont bien vite adaptées. Celles qui ont été postées comme sentinelles n’ont rencontré aucune difficulté, même si les estafettes ont eu un peu de mal à remplir leur fonction. Mais une vigie prénommée Victor a été la dupe d’une mauvaise plaisanterie faite par une fripouille. L’enquête a réussi à identifier cette dernière – un garçon peu recommandable – et la victime a été réconfortée : Victor est à présent la vedette du régiment, décidément c’est une star. »

Faut-il opter pour la manière forte en inventant une forme « masculine » à affubler aux substantifs recrue, personne7, sentinelle, vigie, estafette, dupe, fripouille, victime, vedette, star ? Ou bien faut-il les laisser tels quels en admettant qu’ils deviennent épicènes et ne faire varier que l’article ? En tout état de cause, on peut craindre que leur enlever la marque dite (improprement) du féminin, et dire « le victime », « le personne », etc., serait une « invisibilisation ».

Notes

1 – Voir http://www.academie-francaise.fr/actualites/feminisation-des-titres-et-des-fonctions On peut souligner que l’Académie ne parle pas de « neutre », mais de « genre non marqué » ou « extensif ». Comme on le verra plus loin, l’Académie ne précise pas dans ce bref texte que le genre marqué peut, plus rarement il est vrai, avoir valeur extensive.

2 – Manuel d’écriture inclusive de l’agence Mots clés, dont la promotion figure sur le site officiel du Secrétariat d’Etat en chargede l’égalité entre les femmes et les hommes : http://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/initiative/manuel-decriture-inclusive/

3 – Voir ici même l’article « L’alphabet, machine libératrice ».

4 – « Huit idées reçues ou crétineries sur l’écriture inclusive » par Lucile Bellan et Thomas Messias.

5 – On voit ici que les signataires (j’écris « signataires », stratégie d’évitement, parce que je ne sais pas s’il faut écrire « l’auteur et l’auteure » ou « l’auteur et l’autrice » ou « les auteur·e·s » ou « les auteur·rice·s ») ont aussi des problèmes avec le nombre et pas seulement avec le genre.

6 – Je ne les trouve pas dans les listes. Car pour le nom personne, il est utilisé par le Manuel sans état d’âme au genre marqué (dit féminin) pour désigner aussi bien des femmes que des hommes. On y donne même en exemple la dénomination québecoise des Droits de la personne humaine : à moins d’être « malcomprenant·e » ou androphobe maniaque, on n’en déduit pas que seules les femmes ont des droits. Mais on en conclut que les signataires du Manuel, malgré leurs déclarations, souscrivent bien au concept de genre extensif proposé par l’Académie. Ils le réservent au seul genre marqué, mais ça ce n’est pas du sexisme, c’est seulement un juste retour des choses.

7 – Il faut distinguer le substantif et le pronom « personne ». Au sujet du pronom, le Dictionnaire d’orthographe de Jouette précise que, « étant indéterminé, il est accordé au masculin [je préfère dire : genre non marqué] singulier mais que « si le mot ne peut désigner qu’une femme, l’accord se fait au féminin ». Ainsi on écrira « Personne n’est assez prudent » et « Personne n’était plus belle que Cléopâtre ». Et le Dictionnaire d’ajouter : « Alors qu’une reine dira : Personne n’est plus puissant que moi (les rois étant englobés dans la comparaison). »

© Catherine Kintzler, Mezetulle, 2017.

Voir le dossier des articles sur ce sujet  : https://www.mezetulle.fr/lecriture-inclusive-separatrice-faites-le-test-bisous-a-tous-deux/

Lire aussi sur ce site :
« Féminisation, masculinisation et égalité(e)« 
« L’alphabet, machine libératrice »
« La langue française : reflet et instrument du sexisme ? » par André Perrin

48 thoughts on “L’écriture inclusive pour les malcomprenant·e·s

  1. Jorge Morales

    Exercice n° 2. Transformez le paragraphe suivant en écriture inclusive:

    Les Belges et les Russes, des personnes ayant excellé depuis longtemps dans les beaux-arts et les belles lettres, pour nos plus grandes délices, ont parfois chanté leurs amours déçues à l’aide de belles orgues. En outre, personne ne peut nier que les êtres totalitaires, lèche-bottes, ouailles et autres laquais idéologues, voulant imposer vérités et langues officielles, les ont toujours fait devenir rouges de consternation.

    N.B. Si vous n’y arrivez pas c’est sans doute que le « point milieu » n’est pas signe de grammaire française mais de lavage de cerveau.

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    1. Caspard Annette

      Chape.lle.au bas.se à l’auteur.tric.e de ce.tte chef.fe d’oeuvre.tte! Quand j’aurai le temps (autant dire jamais …), j’essaierai de faire l’exercice.
      Pour le moment, QUI s’y colle ??? Il ou elle aura tout.e ma. considérationne.

      Pendant que j’y suis : qui trouvera, dans le monde actuel, un exemple ENCORE plus C… de projet de SIMPLIFICATION, dans n’importe quel domaine, simplification ayant pour buts la parité, le respect (il était temps!) des femmes, l’humiliation des phallocrates ?

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    2. Georgie Durosoir

      Quel bonheur !
      Il est désormais certain que l’écriture inclusive va permettre aux femmes (Européennes blanches et libérées depuis longtemps) de gagner autant que les hommes. Leur dignité (réduisible à des chiffres comme tout ce qui est humain) est sauve.
      Mais c’est peu de choses quand on pense à ce que cette sublime invention va apporter aux autres : malgré la burka (comment ose-t-on s’attarder à une telle vétille !) elles découvriront là les horizons illimités de la féminité triomphante.
      Quant aux petites filles excisées, ce qu’elles ont subi dans leur corps intime les rend aptes, déjà, à s’émerveiller des inventions humaines. Elles ne douteront pas un instant que l’une des dernières, l’écriture inclusive, est aussi la plus brillante, la plus utile, la plus porteuse d’avenir, d’égalité libératrice et, couronnement du tout, tellement drôle, inattendue, hilarante, burlesque, extravagante, créatrice, désopilante, cocasse, bouffonne, bizarre, effarante, divertissante, inénarrable, extraordinaire, insolite, fabuleuse, fantastique, prodigieuse, renversante, invraisemblable, inimaginable, inconcevable !
      Pour tout dire… impensable

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    3. Lesselier

      Il y a aussi nos soeurs et frères les animales-aux : une marmotte, une girafe, une panthère… Quelle discriminante invisibilisation des mâles cette-ce espèce (je ne mets pas les point au milieu, c’est tout de même trop compliqué) !

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  2. Caspard Annette

    Chère Catherine,

    étant momentanément « sans emploi », comprenez qu’au moment présent je n’ai RIEN à faire, donc que je m’ennuie à en pleurer (dur dur), dès l’annonce de son arrivée je me suis précipitée sur votre nouvel article : « L’écriture inclusive pour les malcomprenant.e.s », l’ai lu, en appliquant la recette que vous citez (et qui provient d’un esprit puissant), et j’ai pensé : là je devrais tromper ma torpeur ambiante en essayant de trouver quelque chose de rigolo, à dire ou à faire, au sujet de cette écriture, invention sortie du cerveau d’un non moins authentique grand esprit !

    J’ai voulu m’amuser avec le texte que vous donnez en exemple, à propos des recrues, sentinelles, estafettes, etc …
    J’y ai passé du temps, je vous assure, eh! bien zut, je renonce … Ce que j’avais commencé n’a absolument pas fonctionné, et je laisse à d’autres commentateurs le loisir de tenter le coup – si cela les amuse, et cela m’amuserait que quelqu’un réussisse …

    Si vous voulez mon avis (même si vous ne le voulez pas), le texte en question est un bon exemple des chausse-trapes, étrangetés et difficultés que nous tend notre belle langue, et je serais CURIEUSE de voir comment un partisan de l’écriture inclusive parviendrait à le transformer en appliquant ses théories ! … Autrement dit, comment il accepterait que, par exemple, de nombreux termes désignant hommes OU femmes soient du genre féminin ? (petite revanche pour nous, d’ailleurs, non ? NON. Quelle revanche ? beaucoup de bruit pour rien …)

    Inventer un équivalent masculin pour « recrue », « vigie », « fripouille » … ? Ou changer l’article ? (qui d’ailleurs, au pluriel, ne changerait pas) ? Ah! ça, pour se SIMPLIFIER la vie et l’écriture, ce serait une belle trouvaille !

    (A signaler : dans mon commentaire, « malcomprenant » est souligné en rouge – je vous prends en flagrant délit de faute d’orthographe, eh! bé bravo !!! En revanche, PAS de rouge sous : .e.s …)

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    1. Ricoxy

       
      Et les noms épicènes d’animaux (panthère, grenouille, couleuvre, etc) ? Va-t-on orthographier un · e panther · ère ? Je proposerais bien « un · e grenou · ille », mais vous iriez croire que je me moque.
       

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  3. Pascale BM

    en accord total, d’autant que je vous avais signalé, en son temps, ces mots, grammaticalement féminin que l’on emploie pour désigner (aussi) des hommes…. Je suis au-delà de la colère.
    Une question : l’écriture inclusive est à la mode, écrivez-vous. A la mode ou exigée? doit-on y recourir, ou peut-on passer son tour? réclamée par les instances administratives (on me dit que des inspecteurs de l’EN -et de lettres- s’y mettent sans vergogne). Les programmes d’apprentissage de la lecture et de l’écriture vont-ils être revus en ce sens?
    Ce qui me choque profondément, ce n’est pas tant qu’on ait envisagé cette infamie -il y a toujours quelqu’un-e (?) pour dire des sottises, mais qu’il y en ait pour emboîter le pas sans barguigner et l’imposer à tous.

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  4. Sabine Prokhoris

    Chère Catherine,

    Ayant comme vous savez une fâcheuse tendance à couper les cheveux.lures en quatre, je me suis demandé si la réforme visant à réformer nos entendement.e.s aliénés (nos cerv.eau.elle.x.s,( ou cerv.elle.eau.s.x ?) nous propose une solution gender correct.e pour résoudre la difficulté.e suivante.e : pourquoi devrions-nous écrire : instituteur.trice et non institutrice.teur ? (etc, etc). Pourquoi le masculin viendrait-il nécessairement systématiquement en premier?
    Dilemme insoluble semble-t-il si l’on voulait satisfaire complètement à l’égalité.e., non ?
    Les adepte.e.s de l’écriture.e inclusi.f.ve (ou inclusi.ve.f), n’y ont pas pensé semble-t-il. Quel.le dommage.e !
    Le problème se corse avec l’exemple suivant (écho à votre poisson.e d’avril.e) : il faut dire, n’est-ce pas, : » la chienne a eu deux chiots et deux chiottes ». Jusque là, ça va. mais si on renverse : « j’ai vu ce matin deux chiottes et deux chiots : s’agit-il des petit.e.s chien.ne.s, ou de toilette pour hommes et pour femmes ? On est différentialiste ou on ne l’est pas, que diable !
    De plus, comment nommer mon bras et ma jambe ? Si je suis une fille : je dis : ma brasse et ma jambe (OK) si je suis un garçon, mon bras et mon jambon (gare aux anthropophages alors) ?
    Continuons l.a.e comba.e.t !!!

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    1. Mezetulle

      Pour avoir rencontré hier à l’émission d’Europe 1 deux partisans actifs de l’écriture inclusive et pris connaissance de quelques-uns de leurs arguments (après avoir lu le Manuel que je cite dans l’article et dont l’un des auteurs était présent), je m’efforce de faire l’avocat du diable. Mais les réponses, à mon avis, ne font que renforcer les problèmes ou en révéler d’autres.
      – L’ordre des groupes de lettres ? on ne fait pas de jaloux, on suit l’ordre alphabétique. Donc on écrira « instituteur·rice ». Le pb est qu’il faut déterminer à partir de quelle « coupure » on applique cet ordre, c’est-à-dire qu’on est renvoyé à la question que je soulève dans l’article : isoler mentalement un radical, considérer à part des groupes de lettres, les « coller » en tenant compte de l’ordre alphabétique. Cela peut être un principe d’encryptage, mais cela ne peut pas valoir comme principe de lecture courante !
      – On est raisonnable : cela ne s’appliquerait (d’après ce que j’ai compris) qu’aux êtres humains. Autrement dit aux personnes… Comme si on pouvait contrôler un brûlot lancé au coeur d’une langue, qui, pour peu qu’il soit pris au sérieux, ne manquera pas de se comporter comme un objet de langue, c’est-à-dire comme un objet quasi-naturel. Comme le feu qui se propage, comme les micro-organismes mutants. J’en ai fait état dans l’article « poisson d’avril » que je cite. Il n’est pas exclu, alors qu’on entend déjà des énormités du genre « cette idée n’a rien de nouvelle » ou « elle s’est prise les pieds dans le tapis » qu’on en arrive à « chiotte et chiot » et autres choses analogues. Le pb général est que l’on confond « évolution » et « prescription », et que l’on prescrit à la langue un état futur : on considère alors la langue comme un pur objet technique programmable.
      – On est raisonnable (suite) : cela ne s’applique (je l’ai appris en coulisse) qu’aux usages « fonctionnels ». Non non, promis, juré, on ne s’attaquera pas à la littérature, à la poésie, etc. Autrement dit, on décrète une coupure culturelle, on bloque la transmission, on nie l’homogénéité de la langue à travers l’ensemble de ses registres et variations. Pour continuer à lire et à s’approprier les grandes oeuvres, il faudra apprendre non pas plusieurs registres de langue, mais deux groupes de règles lexicales et grammaticales. Voilà un beau programme pour une école discriminatoire.

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  5. morose

    A propos des huit idées reçues..
    par Lucile Bellan et Thomas Messias je lis : « (dont on rappelle qu’elle n’est pour l’instant imposée à personne) » .

    Je trouve savoureuse la précision apportée : « pour l’instant »
    Autrement dit je ne perds rien pour attendre. Cependant, mon inertie, ma distraction, mes oublis, mes stéréotypes, ma paresse sont sans limites.

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  6. Fran

    Je trouve qu’imposer « écriture » inclusive, c’est prendre les gens pour des êtres stupides et ignares. Pourquoi ces casseroles (ces points ou tirets me font penser aux ficelles qui retiennent des casseroles, soit les lettres isolées à leur bout ou entre eux) à des enfants qui auront encore plus de mal à se retrouver dans ce charabia illisible. C’est la bêtise-même, car un tabouret, par exemple, n’a pas de sexe, et l’on ne peut pas nous taxer de sexisme quand nous disons : LE tabouret. De même, quand on dit « les demandeurs d’emploi » ou plus simplement « les Français », on se doute bien qu’il s’agit de personnes au chômage ou habitant la France, hommes et femmes confondus (…du.e.s ???) : le « masculin » est un genre non marqué, qui désigne tout un chacun, c’est une forme grammaticale qui n’a rien à voir avec le sexe. J’ai l’impression que beaucoup de gens ces temps-ci ont des problèmes avec la sexualité et font des amalgames… Ça se retrouve dans plein de domaines, aussi divers que PMA, GPA, « mariage pour tous », « l’éducation » sexuelle à l’école… Je ne veux pas être une « infirmière » pour ces infirmes de la culture et déteste qu’ils me polluent la vie avec leurs problèmes. Ils n’ont aucun sens de la priorité, la priorité étant d’instruire les enfants, non de leur inculquer des exercices qui ne leur apprennent rien et surtout ne leur servira à rien dans leur futur.

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    1. Mezetulle

      Au sujet du tabouret et autres inanimés, voir ma réponse à Sabine Prokhoris ci-dessus.

      Je ne souhaite pas non plus faire d’amalgame entre d’une part des questions de pur affichage (mais qui en réalité risquent d’avoir des effets destructeurs et contre-productifs) comme celle de l’écriture « inclusive » et d’autre part des questions qui touchent directement les droits et leur extension comme celle du mariage pour les personnes de même sexe ou la PMA. On peut être défavorable à l’écriture « inclusive » et favorable au mariage pour les personnes de même sexe ainsi qu’à la PMA [Edit : j’avais écrit « GPA » par erreur].
      L’écriture « inclusive » n’a pas pour objet principal de donner ou d’étendre des droits, mais de s’ériger en arbitre de ce qu’il faut dire et ne pas dire, de culpabiliser ceux qui « parlent mal » et de s’en prendre à une langue naturelle en prétendant la façonner comme si c’était un objet technique à la disposition d’une idéologie. Ses partisans prétendent rétablir la « visibilité » des femmes dans tous les énoncés (chaque fois qu’on peut désigner le féminin il faudrait le faire) : on voudrait séparer hommes et femmes, et assigner les femmes à un destin sexualisé, qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

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      1. Fran

        Bien sûr, mais il il a tout de même un lien ente ci et ça. Ils viennent tous 2 de la même idéologie, celle de vouloir, justement, mettre le « féminin » au même « niveau » que le « masculin »…

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        1. Mezetulle

          Les femmes ont les mêmes droits que les hommes : la mise en oeuvre ce principe n’est pas une idéologie, c’est le b-a ba des droits de l’homme… il ne s’agit ici nullement d’une question de « niveau ».
          Mais l’écriture « inclusive » n’a rien à voir avec les droits et l’égalité des droits, et elle repose bien sur une idéologie – voir ma réponse précédente et le commentaire de Jorge Morales ci-dessous.

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          1. Fran

            « Les femmes ont les mêmes droits que les hommes » quel scoop !!! Je n’ai jamais parlé de « droits » mais de « niveau », et par là d’une certaine « idéologie » Quant à votre réponse en quoi ferait-elle « autorité » ? Pas plus que moi, vous ne détenez la bonne parole. Le but des commentaires, c’est, il me semble, de débattre d’idées, non d’imposer doctement ses points de vue.

          2. Mezetulle

            Votre réponse précédente (12 oct. 22.44) précisait « lien entre ci et ça » et « ils viennent tous 2… » : il m’a semblé que cela désignait les 2 objets en question dans l’échange en cours (d’une part les questions d’affichage, de l’autre celles touchant les droits). Mais j’ai probablement mal compris.
            Ce n’est pas faire acte d’autorité que de renvoyer à une explication détaillée ainsi qu’à une analyse développée par un autre commentateur.

      2. Jorge Morales

        G. Orwell a déjà tout dit concernant les éléments qui composent l’entreprise totalitaire du novlangue.
        « L’écriture inclusive » en présente toutes les caractéristiques :

        •Amnésie organisée.
        •Diminution du vocabulaire.
        •Diminution du champ sémantique de la langue.
        •Adhésion et enthousiasme obligatoires face à cette entreprise (ceux qui résistent seront d’abord intimidés, soupçonnés d’être sexistes, misogynes, machos, rétrogrades. Si la culpabilisation ne marche pas, on essaiera de les terroriser en imposant un novlangue officiel. Mais qu’ils soient rassurés, tout ça est pour le bien de l’humanité).
        •Abolition de toute irrégularité linguistique, les dissonances ne sont pas permises (d’où le côté puritain/purificateur et niveleur).
        •Rééducation linguistique forcée des morts et des vivants (certains bureaucrates diversitaires, déguisés en « chercheurs » iront jusqu’à dire que Ronsard était misogyne, et ce n’est pas le seul ni le dernier) .
        •Coloration idéologique du vocabulaire autorisé.
        •Inversion conceptuelle au service de l’idéologie : « le mal c’est le bien », « l’universel abstrait c’est le mâle »…
        •Infantilisation.
        •Réécriture de l’histoire à des fins idéologiques (on vous a menti à l’école, la langue française, donc la France, est sexiste).

        http://www.mezetulle.net/article-la-langue-est-elle-sexiste-suite-124599952.html

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        1. Mezetulle

          Excellent rappel et utile récapitulation, merci !

          D’ici quelques jours, je me propose de faire un petit article « dossier » rappelant l’ensemble des textes qui ont été publiés sur Mezetulle (l’ancien et le nouveau !) sur le sujet ou des sujets voisins.

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  7. Pascale BM

    Écriture inclusive dans un manuel de CE1, éditions Hatier lesquelles se « défendent » en arguant qu’elles appliquent « les recommandations du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes », et qu’ainsi elles font œuvre d’éducation « morale et civique ».
    Circulez!

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  8. Irène Kaufer

    L’écriture inclusive pose des questions et des difficultés, c’est sûr. Mais l’écriture « exclusive », celle du masculin qui l’emporte sur le féminin, en pose aussi. Et prétendre qu’il s’agit seulement d’une règle grammaticale relève tout de même de la mauvaise foi quand on se souvient de ceci : « Le masculin va « l’emporter sur le féminin » au XVIIIe siècle, mais il n’en a pas toujours été ainsi. « Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte », affirme l’abbé Bouhours en 1675. « Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle », complète en 1767 le grammairien Nicolas Beauzée. (cité notamment ici : https://usbeketrica.com/article/feminin-masculin-langue-francaise)
    Peut-on vraiment croire qu’entendre répéter, tout au long de sa scolarité, que « le masculin l’emporte sur le féminin », n’a vraiment aucun effet sur les petites filles… et les petits garçons ?
    L’écriture inclusive peut permettre aussi de réfléchir à des alternatives. Dans l’exemple que vous donnez pour faire rire, on pourrait imaginer ceci : « Les profs conseillent aux élèves qui viennent d’arriver de bien travailler en classe ».
    J’ai participé à un ouvrage collectif entièrement en écriture inclusive, sans que cela pose des problèmes. C’est plus compliqué dans la fiction. Mais au moins, on sort des « évidences »…

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    1. Mezetulle

      1 – Lutter contre l’idéologie détestable qui fut projetée sur la langue française par des grammairiens classiques tels que Bouhours et Beauzée n’implique pas qu’on prenne pour argent comptant leur idéologie et qu’on accepte sur leur seule autorité que la langue est telle qu’ils la caractérisent sur ce point… ! C’est comme si, mutatis mutandis et toutes proportions gardées, on voulait modifier le principe de l’inertie et la théorie des machines simples au motif que Descartes se représentait la mécanique céleste par des tourbillons… Bien au contraire, ces pseudo-règles qui ont humilié les écolières (dont je fus !) pendant plus de 3 siècles, sont à prendre comme idéologiques. Les récuser et les combattre ce n’est pas introduire une idéologie contraire (à laquelle on peut reprocher, sur certains points, d’être structurée comme celle qu’elle combat : voir ci-dessous le point 3), mais examiner les propriétés de la langue. Par exemple, parler de genre marqué et de genre non marqué et étudier la concomitance entre ces genres et leur extensivité (qui n’est pas absolument fixe comme les exemples donnés dans l’article le montrent) serait plus juste et correspond bien mieux au réel. En allemand le pronom de la 3e personne du pluriel (ainsi que celui de la forme de politesse) se décline « au féminin » sie : faut-il prétendre que dans cette langue, « le féminin l’emporte sur le masculin » et en conclure que les peuples germaniques sont moins machistes que ceux dont la langue adopte d’autres formes de déclinaison du pronom ?
      En français, on dit « lui » au cas datif (« je lui donne ») et on dit « il » à l’impersonnel (« il pleut », « il y a », « il est douteux que… ») faut-il changer cela ? On accorde à la forme non marquée « cette idée n’a rien de nouveau« , « cette idée a quelque chose de surprenant » (car ce sont les indéfinis « rien » et « quelque chose » qui sont qualifiés et non « l’idée » : cette fois il s’agit bien de logique à travers la règle de l’accord) ; on écrit « la barre était plus haute que prévu » (car ce qui était prévu, c’est une proposition implicite selon laquelle la barre serait moins haute qu’on ne l’avait imaginé). Pardonnez mon vocabulaire grammatical fruste car je ne suis pas linguiste… mais voir là une domination du « masculin » et proposer de changer cet accord en écrivant, par exemple, « la barre était plus haute que prévue » me semble non seulement idéologique, mais dommageable pour la pensée dans sa structure logique.
      Je vous invite également à méditer l’extrait de la Lettre de Voltaire à Mme Du Deffand cité dans l’article du 1er avril.

      2° Sur les stratégies d’évitement que vous appelez des alternatives. Cela revient à transformer chaque locuteur en auto-censeur sur une question de correction politique et de conformité à une opinion qu’il est bon d’afficher et non pas de correction grammaticale. S’interroger sur la correction grammaticale de ce que l’on dit n’est pas la même chose que de se demander si ce que l’on dit est politiquement correct. Car jusqu’à nouvel ordre (il s’agirait bien d’un ordre nouveau effectivement !) il n’est pas incorrect de dire « Les instituteurs ont conseillé aux nouveaux élèves d’être travailleurs », et tout le monde comprend qu’il s’agit de l’ensemble des instituteurs et de l’ensemble des élèves nouvellement arrivés. Mais un passage à l’écriture inclusive aura pour effet d’interdire cette compréhension. Ceux qui écriront autrement seront soit d’affreux machos soit des malcomprenants – et s’il s’agit de femmes, alors là, ce sera pire : elles auront « intériorisé », pauvres victimes inconscientes, un impératif de domination – le syndrome de la case de l’oncle Tom.
      Par ailleurs, et pour ma part, je trouve particulièrement dépréciative l’alternative « profs » pour « instituteurs » . Mais l’un et l’autre se dit, ou se disent… donc laissez-les vivre ! Je remarque du reste que dans votre exemple vous avez excepté « profs » de l’écriture inclusive. Je comprends bien qu’on peut dire « la prof » mais pourquoi alors ajouter un « e » lorsqu’on écrit « la professeure » ?

      3° Oui, « c’est plus compliqué pour la fiction » ! Mais pas seulement. Pour la poésie aussi : comment va-t-on dire et écrire « Les Amants séparés » (poème d’Aragon) et « La mer efface sur le sable / Les pas des amants désunis » (Prévert) ? Si cette expression doit être transposée en inclusive « les amant·e·s », on indique alors qu’on parle de couples d’hommes (car « les amants » une fois passé à la moulinette de l’écriture inclusive deviendra alors vraiment « masculin » et perdra son extensivité – encore plus fort que Bouhours !) et de couples de femmes, mais pas de couples composés d’un homme et d’une femme, alors que le genre non marqué laisse les choses indéterminées à cet égard et inclut les trois possibilités ! Bel effet boomerang qui atteste que l’écriture inclusive, loin d’inclure les sexes dans une indifférenciation souvent salutaire, les sépare systématiquement en voulant les rendre « visibles » à tout prix dans leurs différences. Ce que Desproges avait parfaitement vu avec son « Françaises, Français ! Belges, Belges ! ».

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      1. Peter Bu

        Ces échanges sont un plaisir, mais, en fait, la démonstration de Mezetulle du 16 octobre 2017 à 12:30, me semble-t-il, aurait pu clore toute cette affaire « inclusive »:

        « (…) comment va-t-on dire et écrire « Les Amants séparés » (poème d’Aragon)(…) ? Si cette expression doit être transposée en inclusive « les amant·e·s », on indique alors qu’on parle de couples d’hommes (car « les amants » une fois passé à la moulinette de l’écriture inclusive deviendra alors vraiment « masculin » et perdra son extensivité – encore plus fort que Bouhours !) et de couples de femmes, mais pas de couples composés d’un homme et d’une femme (…) ! Bel effet boomerang (…). Ce que Desproges avait parfaitement vu avec son ‘Françaises, Français ! Belges, Belges !’ ».

        Si besoin, la contribution de Jorge Morales du 13 octobre 2017 à 14:45 complète cette conclusion : « G. Orwell a déjà tout dit concernant les éléments qui composent l’entreprise totalitaire du novlangue. »

        A part cela, les traductions automatiques du français en anglais, sans parler en d’autres langues, ne sont déjà pas fameuses : avec l’écriture inclusive elles deviendraient impossibles.

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        1. pascaleBM

          Ne parlons pas -mais justement parlons-en! de l’écriture en braille. Les associations ad hoc se sont clairement prononcées contre l’écriture inclusive, on devine pourquoi. Je m’étonne d’ailleurs qu’on ne l’ait pas suffisamment fait savoir.

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    2. Binh

      Refuser la règle « le masculin qui l’emporte sur le féminin » n’autorise pas pour autant à faire n’importe quoi..!
      On peut refuser le capitalisme et éviter, SVP, de bâtir des goulags ou des continents de pauvreté !
      OUI, pour une écriture inclusive du français qui soit opérationnelle, efficace, utile, praticable voire…facile !
      Un peu de créativité, est-ce possible pour les prétendus « contestataires » ou autres prétendus « alternatifs » français ? Encore un effort pour être révolutionnaires, chers militants français… ! Ne pourriez vous pas aussi inventer de nouveaux mots, de nouvelles formules, ou (tout simplement) faire entrer des expressions étrangères (ou régionales) dans le vocabulaire du français qui éviterait cette écriture pointée dite « inclusive) (EPI) qui est totalement illisible et impraticable (et que personne ne maîtrise) ? Si on ne veut pas écrire « bonjour à tous et à toutes », est-on obligé d’écrire « bonjour à tou.s.te.s » ? (à moins que ce ne soit: « tous.tes » ?) Pourquoi pas un nouveau mot: « bonjour à toustes » ? Et d’ailleurs, dit-on vraiment « le masculin l’emporte sur le féminin » pour expliquer ou justifier la règle des accords dans le français ? N’est ce pas une formule diabolisée sur mesure pour justifier les postures simplistes des militants de l’EPI ? Moi, j’ai toujours entendu « le masculin sert de neutre »….Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage. Une chose me semble sûre: avec cette Écriture Prétendue Inclusive, le français sera vite abandonné en 3 ou 4 générations, surtout dans le contexte international actuel où les Français ne sont plus le centre du monde: si écrire en français devient compliqué, alors pas de problème pour les non-idolâtres du français: on passera à l’anglais ! Plus de français, et donc plus besoin d’écriture inclusive du français. L’EPI finira par tuer le projet (louable) de l’inclusion. Un peu comme le communisme stalinien (celui du parti unique armé de LA solution unique à tous les maux) a détruit le projet (louable) du communisme….Un peu aussi comme ces Français qui se croient obligés de parler anglais aux étrangers qui viennent en France (pour rencontrer des Français) et qui finissent par inciter ces étrangers à abandonner leur envie de parler français…. !

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  9. Hello Martine

    De quel cerveau a pu germer l’écriture inclusive ?
    Que penser de ceux qui adhèrent ou suivent ?

    Occupés à des tâches abêtissantes , dressés à répéter des slogans , contraints à une complète uniformité d’opinion, limités dans le choix de mots réduits à un minimum car  » moins le choix est étendu, moindre est la tentation de réfléchir  » , les humains de « 1984 » sont soumis car rendus ainsi incapables d’élaborer une pensée libre et indépendante .
     » Catherine n’avait pas une idée dans la tête qui ne fût un slogan et il n’y avait aucune imbécillité , absolument aucune , qu’elle ne fût capable d’avaler si le Parti la lui suggérait .  »
    L’écriture inclusive a toute sa place dans ce monde glaçant décrit par Orwell. Petits soldats du décervelage scolaire , les pédagogistes qui ont détruit l’école républicaine qui instruisait pour implanter l’école libérale qui divertit et consomme , vont s’engouffrer dans cette opportunité de décerveler davantage.

    Alors que de courageuses féministes de la génération de Gisèle Halimi ont oeuvré avec succès à l’émancipation de toutes les femmes , aujourd’hui, de funestes pseudo-féministes revendiquent leur aliénation au nom de la liberté !

    Martine Hello
    Rennes

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  10. munstead

    Excellent et très drôle, si le sujet n’était aussi triste. Au fait va-t-il falloir réimprimer tous les classiques jusqu’à nos jours … Et que fait-on à la lecture, on développe les deux genres? Qui de la fluidité du texte, du plaisir des mots, de leur assemblage, du rythment de la phrase. Alors que la réforme Rocard n’est pas encore appliquée, des éditeurs se lancent dans cette folle aventure. On imagine l’effet dans les classes difficiles, auprès des bambins.ines (?) qui n’arrivent pas à lire et écrire correctement à 10 ans.

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  11. Bernard Duyé

    Tout à l’heure j’ai lu un commentaire à propos du genre des objets,tels que le « tabouret »,par exemple. En fait cette attribution des « genres » est tout à fait arbitraire: il suffit de se rapporter tout simplement au linguiste F.De Saussure qui a théorisé l' »arbitraire du signe » ….

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  12. Catherine T

    Amour, délice et orgue sont masculin au singulier
    Amours, délices et orgues sont féminines au pluriel…
    Merci pour ce blog

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    1. Bernard Duyé

      Cela illustre bien le caractère arbitraire des « genres » s’agissant de substantifs désignant des abstractions, et que donc le « sexisme » n’a rien à voir avec tout cela….

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  13. Ping : L'écriture inclusive séparatrice. Dossier récapitulatif - Mezetulle

  14. Petrus C.

    Je débarque (un peu par hasard), je lis l’article, trop drôle pour être honnête, je lis les commentaires, trop marqués par le consensus pour être pris au sérieux.

    L’idée générale que je me suis faite de Catherine Kintzler, en l’écoutant ou en la lisant, est, je dois le confesser, assez négative: de véritables facultés intellectuelles sont perpétuellement gâchées par un goût immodéré pour (a) la minimisation, voire la négation, des problèmes auxquelles ses propres positions entendent être des solutions (et le philosophe que je suis apprécie les problèmes bien construits, et en particulier construits de telle sorte que la solution qu’on y propose n’est pas, dès l’abord, évidente par elle-même; à cet égard CK n’est hélas pas toujours à la hauteur); et (b) pour l’usage de la dérision et de la caricature aussitôt qu’une proposition n’est pas en accord avec les propres positions de CK.

    Il serait de bonne méthode, avant de prétendre «démolir» l’écriture inclusive (entreprise en elle-même tout à fait acceptable, qu’on l’accepte ou non à la fin), de présenter les meilleurs arguments qui se puissent trouver pour la défendre, quitte à n’être pas entièrement fidèle à ceux qui sont effectivement employés par ses défenseurs. En somme, il serait de bonne méthode de montrer que l’on ne s’attaque pas à des choses si évidemment stupides qu’elles ne méritent rien de mieux que la dérision. Dans le cas contraire, un lecteur un peu naïf et superficiel pourrait croire que CK est en peine d’arguments rigoureux, ou n’entend rien à ce dont elle prétend parler, ou que son propos n’est rien de plus qu’une vaste pétition de principe enrobée dans un vernis intellectuel à peine plus brillant que celui d’un Bernard-Henri Lévy ou d’un Michel Onfray.

    (Notez au passage la superbe construction littéraire de ce commentaire, puisque je procède délibérément par la dérision et l’ironie, après avoir explicitement nié que ce fussent là ce qu’il convient de faire si l’on se soucie de méthode.)

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    1. Pascale BM

      ce qui relève, au mieux, de la mauvaise foi…
      Peut-on, Cher Petrus -avec un nom pareil on attendait un développement sublime- préciser vos « meilleurs arguments » car, pour le moment, vos propos nous laissent sur notre… faim.
      On attend que vous nous éblouissiez à ce point que nous fassions tabula rasa de tout ce qui vous a précédé.

      Répondre
    2. Catherine Kintzler Auteur de l’article

      L’ensemble de l’article est-il si drôle que ça ? Je ne le pensais pas jusqu’à présent, mais tant mieux s’il l’est. Pourtant, un passage comme celui-ci :

      « Une partie se déchiffre en lecture alphabétique (en voyant ce qui est écrit, on sait quels sons on doit émettre) mais une autre partie ne peut pas se lire ainsi. En effet, dès qu’un terme contient un ou plusieurs « points milieu », il faut repérer les lettres à déplacer pour les coller à un radical commun qu’il faut isoler mentalement, puis ajouter les éventuelles marques du pluriel qui sont à coller aux mots déjà obtenus, toutes opérations d’autant plus difficiles qu’elles ne se présentent pas séquentiellement. Il n’y a plus de principe homogène de lecture.
      Davantage : à certains moments il faut dire ce qu’on voit, à d’autres il faut dire ce qui n’est pas écrit et recourir à une interprétation qui transcende la littéralité. »

      … je le trouve plutôt casse-pieds et rébarbatif – sans compter les renvois et autres notes de bas de page avec références, etc. Sans compter quelques réponses, assez ennuyeuses aussi, aux commentaires ci-dessus. Si cela est drôle, alors je conseille au commentateur, entre autres, l’article L’alphabet, machine libératrice : il y a de quoi s’étouffer de rire.
      Et en plus j’aggrave mon cas : j’ai récidivé avec un article sur la notion d' »inclusion » qui a peut-être échappé au commentateur L’écriture inclusive séparatrice. Faites le test Bisous à tous deux .

      Mais ce que je préfère dans le commentaire de Petrus c’est son appréciation élogieuse de ma personne : « de véritables facultés intellectuelles sont perpétuellement gâchées » – ça me donne un coup de jeune, même si aucun professeur ne s’est jamais avisé d’écrire ce genre de remarque dans un de mes bulletins scolaires. À 70 ans bien sonnés, il serait grand temps que je revienne sur l’ensemble de mes livres et articles, et que j’écrive une vaste autocritique afin d’être à la hauteur de cette brillante intelligence. Le problème est que ce commentaire ne m’aide guère ; il ne me fournit aucun point d’appui précis me permettant d’entamer un travail qui risque quand même d’être assez long. Je crains donc de rester indécrottablement malcomprenante pour le temps qui me reste à vivre.

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    3. Tomei

      Petrus C. nous avertit, comme le frère Jorge du « Nom de la Rose » : « Voilà pourquoi Christ ne riait pas. Le rire est source de doute. » Et qui sait si le doute n’est pas le premier mot de la philosophie… Se rendant compte de sa méprise, Petrus se mord in fine la queue en se prétendant ironique – mais quand on explique le procédé, c’est qu’on s’est planté… aveu touchant de Petrus C.
      Bien, maintenant, puisqu’il était question du mitraillage de nos phrases par des points inclusifs, nous attendons l’impeccable et sérieuse démonstration de Petrus C. car nous ne savons toujours pas ce qu’il en pense.

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  15. Peter Bu

    Ne serait-il pas plus simple et plus utile d’apprendre aux habitant.e.s de ce pays à parler l’allemand, le russe, le slovaque (il y beaucoup d’autres choix), langues où la question de l’écriture inclusive ne se pose pas? Ces langues s’offrent même le luxe d’avoir, à côté du féminin et masculin, un genre neutre. Ce serait une « double contribution » à l’ouverture des esprits.

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    1. Mezetulle

      La confusion entre genre grammatical (ou lexical) et sexe des personnes me semble toujours obscurcir les discussions autour de cette question.
      L’apprentissage des langues devrait justement nous faire réfléchir en des termes un peu plus fins que cette identification grossière et nous montrer que d’une part la présence visible du neutre n’évite pas les questions de « machisme » et que de l’autre une langue où cette présence n’est pas immédiatement visible ne peut pas être rabattue sur un dualisme simpliste qui se contente d’identifier genre linguistique et sexe.
      Vous citez l’allemand. Il se trouve qu’en allemand un des termes signifiant « la femme » – das Weib – est de genre neutre… Le pronom des formes conjuguées au pluriel est sie c’est donc ici la forme dite féminine qui a valeur extensive… En français, une bonne partie des adverbes est formée sur le genre dit féminin (heureusement, cordialement, amicalement, vertement, constitutionnellement…).
      En français il vaudrait mieux parler, plutôt que de « masculin » et de « féminin », de genre marqué (dit féminin) et de genre non-marqué (dit masculin). Le genre non-marqué ayant souvent valeur extensive, notamment au pluriel, et le genre marqué ayant fort souvent valeur intensive ce qui explique très bien la trop fameuse et mal dite règle du « masculin qui l’emporte… ». C’est l’expression de cette règle qu’il faudrait changer et non la règle elle-même qui n’a rien de macho. du reste comme je le fais remarquer dans plusieurs des articles de ce dossier, il existe des termes très courants de genre marqué ayant valeur extensive : la victime, la personne. Et puis les noms d’espèces animales sexuées sont fort souvent au « féminin » : faut-il penser qu’il n’y a pas de mâles chez les girafes ou les panthères ?

      Dans la proposition « je le promets » quel est le genre du pronom « le » ? dans la proposition « il pleut », quel est le genre du pronom « il », dans la proposition « je lui offre un cadeau », quel est le genre du pronom au cas-datif « lui », dans la proposition « rien de nouveau » quel est le genre de l’adjectif « nouveau » ? Je vous suggère de relire la lettre de Voltaire à Mme Du Deffand que je cite à la fin de cet article.

      Par ailleurs, il n’est pas sûr que les pays où on parle des langues dans lesquelles le genre neutre est distinct soient des paradis pour les femmes et que le machisme y soit inconnu… ! Idem pour les pays qui pratiquent des langues où la féminisation est très facile… voir l’article d’André Perrin sur ce point.

      Enfin, à poursuivre jusqu’au bout votre proposition, on peut aussi tout simplement abandonner la langue française. Cela peut aller très vite.

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      1. Jorge Morales

        En italien, on vouvoie toutes les personnes au féminin : « Lei è contenta ? » « Lei è laureata ? » Dois-je me considérer comme victime de sexisme et exiger, quitte à imposer une aberration grammaticale, que l’on me vouvoie au masculin ? (« Lui è contento ? » « Lui è laureato ? ») La langue italienne aurait-elle évolué ainsi depuis des siècles dans le but « d’exclure » de la politesse les personnes de sexe masculin ? Afin de les « invisibiliser » ? Pour rendre opérante une telle hypothèse, dont les présupposés sont évidemment faux, on prendra une phrase énoncée par un personnage ancien (Bouhours ou Beauzée par exemple), on la sortira de son contexte historique, puis on plaquera un schéma (victimaire) contemporain sur elle. Une fois absolutisée, on la fera fonctionner comme une parole révélée afin de justifier une thèse idéologique, dont la conclusion, qui est toujours la même et qui rime avec « stigmatisation », a été écrite par avance. C’est le contraire d’une démonstration.
        En réalité, le vouvoiement italien prend la forme du féminin non pas pour des raisons sociologiques (dans ce cas, on ne s’adresse pas au sexe de l’interlocuteur), mais pour des raisons historiques (on s’adresse à une altesse, à une excellence, à une seigneurie voire à une sainteté – qui a toujours été un homme). Voilà pourquoi l’écriture inclusive est étouffante dans ce qu’elle enferme les individus en interdisant toute distance, toute respiration linguistique ; elle instaure une nouvelle forme de « stéréotype de genre » : les hommes sont des mâles et les femmes des femelles et cela doit être visible même dans l’écriture. Catherine Kintzler a écrit quelque part qu’il n’y a pas plus visible qu’une femme en burqa et pas plus féministe (au sens essentialiste du terme) qu’un Taliban.
        Les langues étrangères – et notamment l’allemand –, du fait de leurs incessants changements de forme/genre grammaticale/lexicale (les mots ne reflètent pas systématiquement la nature des personnes) nous aident en effet à nous libérer de cette terrible assignation, de cette régression essentialiste.
        Le mot « musicien », par exemple, prend toujours la forme du masculin (genre non marqué) en espagnol (« músico ») y compris pour les musiciennes. « Flautista » s’écrit toujours avec un a à la fin (marque du féminin), même si le joueur de flûte est de sexe masculin.
        Pour échapper à cette dérive purificatrice et communautariste, il est également opportun de se rappeler l’avertissement que Platon nous a donné il y a plus de deux mille ans dans son Cratyle, mise en garde remarquablement exposée par Nathalie Heinich dans son essai Les Ambivalences de l’émancipation féminine (Albin Michel, 2003). Le cratylisme est la tendance à confondre le signe et son référent : par exemple croire que le mot « chat » ressemble à un matou ou qu’il miaule. L’écriture inclusive reprend à son compte cette confusion en la radicalisant puisqu’il s’agit d’aligner le signe (une profession, une fonction, un adjectif, un nom) sur son référent (le sexe de la personne qui parle ou de laquelle on parle). Cet alignement forcé obéit à une logique absurde et aliénante qui épingle les gens à leur nature (leur sexe) et, séparant irrémédiablement les sexes, exclut les femmes en les enfermant dans un monde à part. Refuser le cratylisme c’est échapper à toute tentative d’embrigadement genré. Ce n’est au fond que le combat républicain pour la liberté individuelle.

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        1. pascaleBM

          Le vouvoiement au féminin en italien est la marque d’un usage soutenu de la langue, l’italien courant a fini par le réserver, et dans une classe d’âge qui tend à disparaître (!) à celle à qui l’on s’adresse pour la première fois et pour lui accorder une marque de respect. Et le Lei fait une catégorie grammaticale à soi seul, c’est « la forma Lei » , à l’endroit des hommes ou des femmes en effet, à qui l’on s’adresse à la troisième personne (ce n’est pas un vouvoiement, à strictement parler, le verbe se conjugue à la 3ème pers. du sing.) De majesté en effet, d’où la majuscule obligatoire à « Lei » à l’écrit pour bien en montrer la valeur socialement supérieure.
          Et tout ce qui se dit, ici même et ailleurs, pour montrer que l’injonction de féminisation est une injonction sexiste au pire sens du terme, trouve en effet ses meilleurs arguments dans la linguistique comparée. Soit avec les langues qui n’ont pas le même usage du masculin et du féminin que le français, soit avec celles qui n’en ont pas du tout.
          [Il m’est venu (car cette affaire me taraude) une réplique à l’endroit de ceux qui prétendent à la modernité nécessaire de l’usage du français tel qu’avant le XVIIème siècle pour faire valoir leur bon droit qu’il me plaît d’entendre que pour avancer il vaut mieux reculer….]

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  16. Peter Bu

    Merci pour ces commentaires éclairants.
    En écrivant (23 novembre 2017 à 16:30) : « Ne serait-il pas plus simple et plus utile d’apprendre aux habitant.e.s de ce pays à parler l’allemand, le russe, le slovaque (il y beaucoup d’autres choix), langues où la question de l’écriture inclusive ne se pose pas? », je n’oubliais pas que cela rend pas ces langues cohérentes par rapport aux genres. Mais les apprendre est utile, d’abord en soi car chaque langue est un moyen de communication et un mode de pensée particulier, et ensuite pour comprendre que l’on peut voir les relations entre les hommes et les femmes différemment qu’en français.

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  17. Ping : « Le sexe et la langue » de Jean Szlamowicz, lu par Jorge Morales - Mezetulle

  18. Frédéric Pierron

    On le sait depuis longtemps, les langues prennent leur chemin sans personne pour les guider, mues par une économie interne, plus souvent phonétique que grammaticale en ce qui concerne l’orthographe. C’est donc l’oral qui aura le dernier mot, et non la dictature de telle ou telle graphie. Tout cela révèle ce que j’appelle la twitterisation de la culture : des débats qui remuent des groupuscules, et face auxquels le peuple reste pantois, avant de reprendre le travail.
    Je suis aussi effaré de voir à quel point ces débats enterrent toute réflexion sur les inégalités sociales en général. On oppose des catégories de sexe, de couleurs de peau (au point de « raciser » à nouveau les propos sur l’Homme), et je ne vois plus personne parler de lutte des classes par exemple, alors que les inégalités aujourd’hui sont les mêmes qu’hier : riches ou pauvres, éduqués ou non, soignés ou non, protégés ou non. Pendant ce temps, ceux qui ont le temps, et qui sont même académiquement payés pour penser notre société et la rendre meilleure (sinon, à quoi servent-ils ?), plongent dans un obscurantisme forcenés, mais fort payant en likes, retweets et abonnés…

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