À lire dans le n°114 (novembre 2017) de Philosophie magazine, l’entretien entre Jean-Michel Blanquer ministre de l’Éducation nationale et Catherine Kintzler. Leurs propos ont été recueillis, introduits et présentés par Martin Legros, rédacteur en chef.
Voici la présentation du texte et trois brefs extraits qui ne font qu’effleurer quelques sujets abordés au cours de ce substantiel échange.
« Pour rompre avec un égalitarisme et un pédagogisme dévoyés, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer propose de revenir aux compétences fondamentales dès le plus jeune âge. Une ambition que partage la philosophe et ancienne prof Catherine Kintzler, qui s’inquiète cependant des possibles dérives des réformes en cours et de la remise en cause du statut de la philosophie au baccalauréat. »
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« CK – […] il faut qu’en sortant de l’école le citoyen puisse combattre à armes égales avec ceux que nous appelons les experts. Cela ne veut pas dire qu’il connaîtra les mêmes choses, mais qu’il aura les principes qui lui permettront de juger de la vraisemblance des discours qu’on lui tient.
JMB : C’est une des seules choses que je combats de manière frontale : l’édulcoration de l’éducation au nom de l’égalité, qui est à mes yeux une des grandes erreurs des temps passés. Et je le tire non pas de mon chapeau, mais des expérimentations, de la comparaison internationale, et de la science. […] »
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« CK : […] est-ce que l’autonomie des établissements ne va pas remplacer un caporalisme d’État par un caporalisme des chefs d’établissement […] ? Et est-ce qu’on ne met pas ainsi en place une éducation qui n’est plus nationale mais hétérogène? C’est ce versant de votre libéralisme que je redoute. Car on peut craindre une contractualisation généralisée, y compris dans les services publics.
JMB : C’est une question d’équilibre entre un impératif d’unité nationale et un impératif d’autonomie, de liberté et de responsabilité, qui permettra aux acteurs de développer leurs projets et leurs méthodes. Je n’ai jamais plaidé pour une autonomie absolue. Il s’agit de faire évoluer notre système scolaire grâce à la liberté vers plus d’égalité. Les acteurs du monde enseignant sont épuisés par les changements incessants de lois et de programmes. […] »
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« CK : […] Si d’aventure la philosophie passait en contrôle continu [au bac], je suis convaincue que cela porterait un coup funeste à sa place exceptionnelle dans notre culture politique. […] Nous voyons fleurir aujourd’hui le fanatisme et les théories du complot. Et dans la lutte intellectuelle que les démocraties doivent engager contre ces phénomènes, nous avons besoin des humanités. […] J’ai toujours été critique à l’égard du contrôle continu parce qu’il faut penser aux candidats libres et parce qu’il ne faut pas confondre le professeur et l’examinateur.
JMB : […] soyez certaine que je ne serai jamais le Ministre de l’Éducation Nationale de l’édulcoration de la philosophie en France. Mais bien plutôt celui du renforcement de la philosophie. Les voies de ce renforcement doivent faire l’objet d’un débat au cours des prochains mois. […] je ne passerais pas le temps que je suis en train de passer avec vous si je pensais que la philosophie était un simple supplément d’âme ou une variable d’ajustement. […] »
L’intégralité du texte est en ligne sur le site de Philosophie magazine et bien sûr dans le magazine imprimé (p. 8-14), où l’on pourra lire aussi, entre autres, le dossier sur le thème « Comment vivre avec l’idée de la mort ? » et un passionnant entretien avec Francis Wolff « Nous humains ne savons plus trop qui nous sommes ».