Archives de catégorie : Laïcité

Conseil des sages de la laïcité… : deux textes officiels à comparer

La modification des conditions encadrant l’existence et l’activité du Conseil des sages de la laïcité et des valeurs de la République (en abrégé CSLVR) est intervenue par un arrêté du ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse Pap Ndiaye daté du 12 avril 2023, arrêté modifiant l’arrêté du ministre précédent Jean-Michel Blanquer daté du 19 février 2021. Le présent article a pour objet de mettre les modifications en évidence.

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L’union « des droites » sur la paille de la Nativité : une logique identitaire

Ceux qui appellent de leurs vœux (jusqu’à présent pieux) l’union de la droite LR et du RN sont enfin exaucés : celle-ci s’effectue sous nos yeux « dans la joie et la paix » d’un seigneur qui n’a jamais complètement digéré la loi du 9 décembre 1905. C’est dans les détails que se glisse la grâce : foin des programmes politiques encombrants, la jonction trouve asile sur la paille qui accueille les crèches de la Nativité dans certaines mairies. Ce faisant, elle renforce le « wokisme », mais aussi un certain « progressisme » qu’elle prétend combattre.

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La laïcité dans tous ses états

Commentaire de l’émission « Répliques » du 12 novembre 22

À peine terminais-je d’écouter le « podcast » de l’émission Répliques (La laïcité : état des lieux) du 12 novembre 2022, où Alain Finkielkraut avait invité Iannis Roder et Jean-Fabien Spitz, à peine me disais-je que la pseudo-argumentation de Jean-Fabien Spitz méritait quelques commentaires bien sentis que, relevant mes messages, je trouve cet article envoyé par André Perrin ! Fidèle au style caustique et précis dont il nous a déjà régalés dans plusieurs livres – mentionnons le tout récent Postures médiatiques (L’Artilleur, 2022) – l’auteur y reprend, en les démontant, les sophismes et inexactitudes que Jean-Fabien Spitz a égrenés tout au long de l’émission.

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Vous avez dit « laïcité positive » ?

En parlant de « laïcité positive » le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye reprend un terme fréquemment utilisé pour réclamer à la laïcité – qu’on juge rigide et trop intransigeante – des « accommodements », une « ouverture ». Ce terme, que Nicolas Sarkozy avait cru bon de promouvoir à plusieurs reprises, suggère par lui-même l’aspect politique qui gouverne son emploi. L’adjectif « positive » induit en effet un champ sémantique où prendrait place, à l’opposé, une « laïcité négative » qu’il s’agirait de combattre, de réduire et peut-être même d’effacer. Mais la thèse d’une « laïcité négative » ne tient pas debout : car la laïcité a posé plus de libertés que ne l’a jamais fait aucune religion. On n’a pas à demander à la laïcité d’être « positive » : c’est aux religions qu’il appartient de le devenir en renonçant à leurs prétentions à l’exclusivité intellectuelle et politique.

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Salman Rushdie victime d’un attentat islamiste : l’accusation d’islamophobie peut tuer !

Charles Arambourou a rédigé ce texte, publié au nom de l’UFAL sur son site hier 13 août, auquel je souscris entièrement. Je le remercie, ainsi que l’UFAL, de m’autoriser à le reprendre dans Mezetulle.

L’écrivain Salman Rushdie, auteur du roman « Les Versets sataniques », avait été condamné à mort pour blasphème par une fatwa de l’ayatollah Khomeini en 1989, et sa tête mise à prix par le régime des mollahs en Iran. Bien que vivant sous protection, il vient d’être agressé au couteau à New York par un fanatique chiite, et gravement blessé.

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« Burkini » : communiqué de presse du Conseil d’État

Le CE confirme la suspension du règlement intérieur des piscines de la ville de Grenoble

Dans son article « Piscines de Grenoble : savoir de quoi on parle », Charles Arambourou a proposé aux lecteurs de Mezetulle une analyse très précise du nouveau règlement intérieur des piscines publiques de Grenoble autorisant le port de « tenues non près du corps ne dépassant pas la mi-cuisse » (autrement dit du « burkini »..), ainsi que de la décision du Tribunal administratif du 26 mai 2022 qui « retoquait » ledit règlement – cette autorisation du port du « burkini » est une disposition dérogatoire prise pour satisfaire une revendication religieuse. On apprend aujourd’hui que le Conseil d’État, saisi en appel, vient de confirmer ce jugement.
Mezetulle publie ci-dessous le communiqué de presse du CE – et invite les lecteurs à lire l’article de Charles Arambourou, augmenté (24 juin) d’un Addendum commentant la décision du CE.

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Piscines de Grenoble : savoir de quoi on parle

Edit du 24 juin 2022 : lire à la fin de l’article l’Addendum commentant la décision du Conseil d’État.

Provocation politicienne en période électorale, nouvel épisode de l’apartheid imposé aux femmes musulmanes par les intégristes, ou simple histoire de chiffons sans rapport avec la religion ? L’affaire des « burkinis » dans les piscines de Grenoble donne lieu à des torrents d’encre et d’octets numériques où la raison trouve rarement son compte. D’où un certain nombre d’approximations, voire de simples énormités, proférées par les camps en présence.
Or le maire de Grenoble n’a pas « autorisé le burkini dans les piscines de la ville » – il est plus malin ! Le Tribunal administratif n’a pas davantage « interdit le burkini ». Quant à la laïcité, elle ne se limite pas à la loi de 1905, et il n’est pas vrai que dans l’espace public, on puisse « porter la tenue que l’on veut ».
Le plus simple n’est-il pas de remonter aux sources et de prendre la peine de lire les règlements et la première décision de justice en cause ? Sans oublier que le Conseil d’État doit se prononcer en appel.

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Liberté d’expression, neutralité et laïcité dans les activités sportives

Un vademecum du « Conseil des sages »

Si la question résurgente du « burkini » n’a pas changé de nature politique depuis 2016, en revanche, en se manifestant dans les piscines publiques, elle affecte un terrain plus sensible parce que plus réglementé que celui des plages. Elle n’est qu’un jalon parmi d’autres tests que les menées communautaristes font subir aux principes républicains, notamment dans le domaine du sport auquel il convient de s’intéresser plus largement en s’aidant d’un ouvrage éclairant.
Publié récemment et téléchargeable sur la page du Conseil des sages de la laïcité, le vademecum « Liberté d’expression, neutralité et laïcité dans le champ des activités physiques et sportives » analyse de manière concrète la plupart des situations qui, dans le domaine de l’activité sportive, peuvent contrevenir aux principes républicains. Doit-on, peut-on y faire obstacle et si oui, comment ?

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La dualité du régime laïque

L’expression « intégrisme laïque » a-t-elle un sens ?

La laïcité de l’association politique construit un lien disjoint des liens communautaires existants ; elle installe un espace zéro, celui de la puissance publique, laquelle s’abstient en matière de croyances et d’incroyances et se protège des croyances et incroyances. Mais le régime laïque ne se réduit pas au seul principe de laïcité ; il repose sur une dualité. D’une part ce qui participe de l’autorité publique (législation, institutions publiques, école publique, magistrats, gouvernement…) s’interdit toute manifestation, caution ou reconnaissance en matière de cultes, de croyances et d’incroyances – c’est le principe de laïcité stricto sensu. De l’autre, partout ailleurs y compris en public, dans l’infinité de la société civile (la rue, les moyens de transport, les espaces commerciaux…) et bien entendu dans l’intimité, la liberté d’expression s’exerce dans le cadre du droit commun. Sans cette dualité, qui produit ce que j’appelle la respiration laïque, la laïcité perd son sens.

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Le port du voile n’a jamais libéré aucune femme

Le droit de porter le voile en public est aussi celui de dire publiquement tout le mal qu’on en pense

Voilà que le port du « voile islamique » refait surface, comme si la question n’avait pas été largement débattue depuis 1989 et éclaircie notamment par la loi de mars 2004. L’un des candidats à la présidence de la République (en l’occurrence une candidate), profère une ânerie antilaïque en prétendant vouloir l’interdire « dans l’espace public ». L’autre, fidèle à la sinuosité du « en même temps », entretient le flou, dit tout et son contraire à ce sujet – ne l’a-t-on pas entendu, après avoir dit ce port « non conforme à la civilité », approuver une citoyenne voilée se prétendant « féministe » ? Il faut donc y revenir.

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Le professeur, le rappeur homo sapiens et le prédicateur (par Delphine Girard)

Delphine Girard analyse l’effarante et effrayante histoire de « Stéphanie », professeur de SVT qui, peu après l’assassinat de Samuel Paty et dans la même académie, fut accusée de « racisme » et menacée par un père d’élève. N’avait-elle pas, dans son cours sur les origines et l’évolution de l’espèce humaine, illustré Homo sapiens par une image du rappeur Soprano ? Effarante histoire : soutenue du bout des lèvres par une institution encline à déstabiliser les professeurs, « Stéphanie » dut d’abord « s’expliquer » avant d’être exfiltrée dans une autre académie. Effrayante aussi : le crédit accordé à la parole prévenue et convenue des élèves, relayée et amplifiée par des parents idéologues, entend une fois de plus faire savoir aux enseignants de France qu’ils sont épiés et que la pression s’accentue pour les pousser à l’autocensure. Allons-nous laisser des prédicateurs s’emparer de l’école ?

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Doit-on enseigner le « respect des convictions philosophiques et religieuses » d’autrui ?

Réflexions sur un passage du programme d’Enseignement moral et civique

Je me rappelle l’émission « Répliques » du 24 avril 2021 . Elle a mis en présence François Héran (professeur au Collège de France) et Souâd Ayada (directrice du Conseil supérieur des programmes de l’Éducation nationale) au sujet de « la liberté d’expression », après l’assassinat de Samuel Paty et la publication de la « Lettre aux professeurs » de F. Héran. À un moment, F. Héran a objecté habilement à S. Ayada que, le « respect des convictions religieuses d’autrui » figurant dans le programme d’enseignement moral et civique (EMC), on pouvait récuser légitimement le fait de « montrer » certaines caricatures. S. Ayada dut se donner bien du mal pour soutenir la liberté du professeur de choisir ses moyens dans un tel cadre. Car, malheureusement, elle ne pouvait pas nier directement le fait : oui, le « respect des convictions » figure expressément dans le programme officiel… Ce qui appelle quelques remarques.

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« J’ai exécuté un chien de l’enfer. Rapport sur l’assassinat de Samuel Paty » de David di Nota, lu par C. Kintzler

Le livre de David di Nota « J’ai exécuté un chien de l’enfer. Rapport sur l’assassinat de Samuel Paty » (Paris, le Cherche-Midi, 2021), est une « contre-enquête » accablante sur le dispositif qui a conduit à l’assassinat de Samuel Paty. C’est une lumineuse et consternante remontée vers la doctrine pédagogique officielle qui a consenti à la série de rumeurs et d’accusations mensongères orchestrée par l’islamisme et l’antiracisme dévoyé qui l’accompagne. C’est un livre poignant, magnifiquement et sobrement écrit aux modes dramatique et narratif. S’y déroule d’abord, découpé par les entrées en scène, le scénario « à la fois bienveillant et meurtrier » d’une tragi-comédie politique. L’auteur retrace et analyse ensuite, en l’introduisant par un conte philosophique, l’édifiante histoire de la culture du respect dû aux croyants.

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Faut-il ajouter « Laïcité » à la devise républicaine « Liberté, Égalité, Fraternité » ?

Faut-il ajouter « Laïcité » à la devise républicaine ? Je n’y suis pas favorable. Un tel ajout rendrait la devise hétérogène en lui faisant viser deux objets disjoints. Et il affaiblirait l’intelligibilité du triptyque dont l’ordre et la clôture n’énoncent pas un classement, mais un fonctionnement.

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Campagne de rentrée du Ministère de l’Éducation nationale sur la laïcité : quelques remarques critiques

J’ai appris par la presse que le Ministère de l’Éducation nationale lance une campagne en faveur de la laïcité lors de cette rentrée scolaire 2021-2022. Les lecteurs de Mezetulle savent que je fais partie du « Conseil des sages de la laïcité » installé en janvier 2018 par le ministre Jean-Michel Blanquer, présidé par Dominique Schnapper. Ils peuvent à juste titre s’interroger sur le rôle éventuel du Conseil dans cette campagne consacrée à la laïcité, particulièrement en prenant connaissance des huit affiches de lancement. C’est en toute indépendance que je propose les remarques critiques qui suivent.

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Entretien Figarovox : voile des assesseurs, burkini…

Mis en ligne le 2 juillet, on peut lire  en accès libre sur le site Figarovox un entretien avec Aziliz Le Corre  au sujet du voile des assesseurs dans les bureaux de vote et, derechef (car j’avais abordé la question en 2016) du « burkini ». L’entretien se termine par un commentaire de l’ambivalence de l’expression « espace public » et un rappel de la dualité des principes dans le fonctionnement du régime laïque.

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Non, la laïcité n’est pas d’origine chrétienne (par Jean-Pierre Castel)

Jean-Pierre Castel examine une idée répandue qui attribue au christianisme l’origine de la laïcité. Récemment reprise par Jacques Julliard dans un article du Figaro que l’auteur commente, cette idée confond distinction et séparation, et ce faisant elle élude ou détourne de son sens la question fondamentale de l’autonomie du politique. L’auteur expose pourquoi à ses yeux il est plus pertinent, en matière de laïcisation de la pensée, de se tourner vers l’héritage grec plutôt que vers « l’exclusivisme des textes sacrés abrahamiques ».

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Liberté de croyance et liberté d’expression selon François Héran (par Véronique Taquin)

Réviser la laïcité, pourfendre le « privilège blanc » : une nuit du 4 août à l’envers

Véronique Taquin a lu de près le livre de François Héran « Lettre aux professeurs sur la liberté d’expression » . Dans cette analyse critique détaillée et documentée, elle met en évidence, notamment, comment F. Héran appelle de ses vœux un droit multiculturaliste (sous forme d’une diversité juridique surplombante) qui, par l’effet d’une législation européenne fantasmée, obligerait la France à réviser le droit laïque et républicain engoncé dans un « particularisme ».

Au passage quelques énormités et sophismes sont épinglés, tel le présupposé paternaliste selon lequel les immigrés seraient naturellement brimés par la loi laïque et ne pourraient pas en être, comme les autres, les bénéficiaires – cela en dit long sur une conception de la liberté qui consiste à préserver l’identité et les traditions religieuses figées dans une essence. Une analyse approfondie est également consacrée au retour du délit de blasphème par le biais victimaire des sensibilités offensées, ainsi qu’à la notion infalsifiable de discrimination indirecte.

Finalement, pour décider une « nuit du 4 août » à l’envers – événement qui inaugurerait une politique racialiste détruisant le droit national et l’égalité devant la loi – les experts d’un courant identitaire des études postcoloniales seraient-ils plus légitimes que les citoyens ?

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« Enseigner le fait religieux à l’école : une erreur politique ? », sur le livre d’Aline Girard

Le livre d’Aline Girard « Enseigner le fait religieux à l’école : une erreur politique ? » (Minerve, 2021) ne s’inscrit pas dans le consensus qui, depuis le début des années 2000, entoure la question : il l’examine et montre que, loin de se réduire à une mise à jour pédagogique, les modalités d’introduction de cet enseignement en font un « événement idéologique majeur » qui affecte l’idée même d’école républicaine.
J’ai eu le plaisir de lire ce livre très documenté et argumenté dès son premier jet et d’en écrire la préface que je publie ci-dessous, avec l’aimable autorisation de l’éditeur Minerve. Je la fais suivre d’une brève analyse qui s’appuie sur le parcours du livre.

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